[V] Archives du Campement de l'Ouest [terminé]
Publié : 18 oct. 2007, 21:05
Extrait des Archives du Campement de l'Ouest, Tenues sous Tin-Mirhenil
Automne, Depart de Selena
Cela fait plusieurs Lune qu'elle reste ici, assise, les yeux rivés à la mer, insensible à la plainte des vents. Nul ne sait ce qui motive son chagrin, mais Enehya, notre vénérable guérisseuse, pense que le mal est intérieur, et que l'enfant seule peut mener sa guérison.
J'ai vu de mes yeux les sillons de sel sur ses joues. Son regard inanimé, comme si elle s'était à jamais noyée dans ce vide qui la ronge. Elle ne parle plus, refuse toutes nourritures, et les cordes de sa mandoline ne résonnent plus d'aucuns sons.
As-t-elle perdue la raison ? Quel malheur a bien pu frapper la petite pour qu'ainsi, plus jamais ne s'élève le cristal de sa voix ? Est-ce la un présage d'une ruine frappant notre campement ?
Je dois réunir les anciens. Il faut apporter des réponses. Je crains sinon que le mystère n'éveille l'hostilité du peuple à son encontre.
Mon enfant ... Petit pinson espiègle et taquin ... Reviens nous ...
Je refuse de perdre une autre de mes filles !
[...]
Le Grand Conseil a été réuni, nous avons fait venir la petite.
Le silence assourdissant, est tombé comme une chape de plomb sur l'assemblée à son entrée.Petit fantôme bleuté, flottant étrangement dans sa robe jaunie par les embruns. Telle une enfant, elle tenait la main de la vieille Enehya. Elle était apeurée, et avait cet air qu'ont les animaux pris au piège dans une traque qu'ils savent perdue d'avance.
En tant que guide, c'est moi qui ai mené l'entretien, lui exposant nos préoccupations à son sujet, et les risques de son mutisme.
"Mon enfant, cela fait maintenant des jours et des jours que tu es partie t'isoler, murée dans un silence et un tourment qu'aucun de nos sages n'a pu soulager.
Cette tempête qui t'agite, plonge chaque membres du camp dans des interrogations funestes et suspicieuses.
Nous avons, autant que faire se peut, respecté ton choix d'être seule. Mais il est temps maintenant, pour ton bien et celui de la communauté, que tu exprimes les raisons de ce mal mystérieux."
Affolée, elle guetta l'appui de la vieille qui l'accompagnait, dans un immense effort ouvrit la bouche, puis se ravisa.
Sa pensée me vint alors :
- " Je ne peux pas père, je ne peux parler de cette angoisse qui me ronge, car bien maigres et ridicules sont mes raisons pour vous inquiétez, et pourtant, malgré cette honte d'être la cause de vos soucis, je ne trouve plus l'audace de dire ...
- Alors chante mon enfant, si ta pensée s'y refuse, ta voix peut être pourra dire pour toi ."
Un souffle rauque et fiévreux d'abord, sembla nouer sa gorge. Fermant les yeux, une larme perla, et alors s'éleva la douce mélodie que nous connaissions tous. Celle de Selena, Fille de Tin-Mirhenil, du campement de l'ouest des Continents Bleus.
Elle chanta, innondant la salle de son chagrin trop longtemps contenu. Elle chanta la vie simple des jours heureux, la mort de sa soeur ainée trop vite disparue, la solitude et le sentiment de ne pas être à sa place, et la crainte de ne pas connaître l'amour.
Petit à petit, nous vîmes l'éclat de ses prunelles pailletées revenir, ravivée par l'éclat de son eau. Nous étions comme suspendue à cette mélodie bouleversante, faisant écho à bien des douleurs oubliées.
Quand le chant se tut, ce fut la guérisseuse qui pris la parole, à la grande stupéfaction de tous.
" Ne t'agite donc pas tant petit oiseau
Ta cage n'est pas fermée par des barreaux,
Va, prends ta liberté,
Va, à travers l'horizon
Chante pour nous le monde et ces mirages
Et trouve celui que tu attends."
[...]
La petite est partie ce matin, sa mandoline au dos, pleine d'espoir. Elle m'a confié dans une dernière embrassade son petit lapin des dunes qu'elle chérissait tant. La reverrais-je un jour ? Revenant au village, heureuse de celui qu'elle aime et portant un enfant ?
La reverrais-je seulement ?
Ce sont les craintes d'un père qui parle, au plus profond de mon coeur, je sais qu'elle ira bien.
Automne, Depart de Selena
Cela fait plusieurs Lune qu'elle reste ici, assise, les yeux rivés à la mer, insensible à la plainte des vents. Nul ne sait ce qui motive son chagrin, mais Enehya, notre vénérable guérisseuse, pense que le mal est intérieur, et que l'enfant seule peut mener sa guérison.
J'ai vu de mes yeux les sillons de sel sur ses joues. Son regard inanimé, comme si elle s'était à jamais noyée dans ce vide qui la ronge. Elle ne parle plus, refuse toutes nourritures, et les cordes de sa mandoline ne résonnent plus d'aucuns sons.
As-t-elle perdue la raison ? Quel malheur a bien pu frapper la petite pour qu'ainsi, plus jamais ne s'élève le cristal de sa voix ? Est-ce la un présage d'une ruine frappant notre campement ?
Je dois réunir les anciens. Il faut apporter des réponses. Je crains sinon que le mystère n'éveille l'hostilité du peuple à son encontre.
Mon enfant ... Petit pinson espiègle et taquin ... Reviens nous ...
Je refuse de perdre une autre de mes filles !
[...]
Le Grand Conseil a été réuni, nous avons fait venir la petite.
Le silence assourdissant, est tombé comme une chape de plomb sur l'assemblée à son entrée.Petit fantôme bleuté, flottant étrangement dans sa robe jaunie par les embruns. Telle une enfant, elle tenait la main de la vieille Enehya. Elle était apeurée, et avait cet air qu'ont les animaux pris au piège dans une traque qu'ils savent perdue d'avance.
En tant que guide, c'est moi qui ai mené l'entretien, lui exposant nos préoccupations à son sujet, et les risques de son mutisme.
"Mon enfant, cela fait maintenant des jours et des jours que tu es partie t'isoler, murée dans un silence et un tourment qu'aucun de nos sages n'a pu soulager.
Cette tempête qui t'agite, plonge chaque membres du camp dans des interrogations funestes et suspicieuses.
Nous avons, autant que faire se peut, respecté ton choix d'être seule. Mais il est temps maintenant, pour ton bien et celui de la communauté, que tu exprimes les raisons de ce mal mystérieux."
Affolée, elle guetta l'appui de la vieille qui l'accompagnait, dans un immense effort ouvrit la bouche, puis se ravisa.
Sa pensée me vint alors :
- " Je ne peux pas père, je ne peux parler de cette angoisse qui me ronge, car bien maigres et ridicules sont mes raisons pour vous inquiétez, et pourtant, malgré cette honte d'être la cause de vos soucis, je ne trouve plus l'audace de dire ...
- Alors chante mon enfant, si ta pensée s'y refuse, ta voix peut être pourra dire pour toi ."
Un souffle rauque et fiévreux d'abord, sembla nouer sa gorge. Fermant les yeux, une larme perla, et alors s'éleva la douce mélodie que nous connaissions tous. Celle de Selena, Fille de Tin-Mirhenil, du campement de l'ouest des Continents Bleus.
Elle chanta, innondant la salle de son chagrin trop longtemps contenu. Elle chanta la vie simple des jours heureux, la mort de sa soeur ainée trop vite disparue, la solitude et le sentiment de ne pas être à sa place, et la crainte de ne pas connaître l'amour.
Petit à petit, nous vîmes l'éclat de ses prunelles pailletées revenir, ravivée par l'éclat de son eau. Nous étions comme suspendue à cette mélodie bouleversante, faisant écho à bien des douleurs oubliées.
Quand le chant se tut, ce fut la guérisseuse qui pris la parole, à la grande stupéfaction de tous.
" Ne t'agite donc pas tant petit oiseau
Ta cage n'est pas fermée par des barreaux,
Va, prends ta liberté,
Va, à travers l'horizon
Chante pour nous le monde et ces mirages
Et trouve celui que tu attends."
[...]
La petite est partie ce matin, sa mandoline au dos, pleine d'espoir. Elle m'a confié dans une dernière embrassade son petit lapin des dunes qu'elle chérissait tant. La reverrais-je un jour ? Revenant au village, heureuse de celui qu'elle aime et portant un enfant ?
La reverrais-je seulement ?
Ce sont les craintes d'un père qui parle, au plus profond de mon coeur, je sais qu'elle ira bien.