[V] Doragun

Ici, l'on conte des chroniques relatives aux îlots centraux
Doragun
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Inscription : 24 mars 2007, 16:48

[V] Doragun

Message par Doragun »

« Le loup qui veut créer sa meute part ! »
Je suis parti… revenu… reparti… Il n’y a plus rien maintenant, ou je n’ai rien trouvé quand je suis repassé plutôt…
Comme tous les jeunes Galdurs, je suis parti pour faire mes preuves et trouver ma voie. J’avais choisi de partir pour les îlots centraux. J’ai juste eu le temps de découvrir le Trépont , la vallée de Mynadar et le Désert des Pins. Un soir, chez Reca, un commerçant humain m’a transmis un message de mon père. « Viens. La guerre arrive. » L’homme n’en savait guère plus. Des rumeurs courraient sur un conflit entre deux clans galdurs. Une histoire de pâturage et d’accès aux montagnes naines. Mon ne savait pas écrire, c’était juste un message oral.



Je me souviens de mon retour. C’était le printemps. Au campement, les arbres étaient en fleurs. Les cerisiers en particulier. Rouge. Comme une flamme dans le ciel vu de loin. Ou comme une flaque de sang en regardant les fleurs tombées.
Tout le monde était confiant. C’était un conflit banal. Nous avions l’avantage de connaître le terrain et de meilleurs chevaux. Les premiers combats, des escarmouches en fait, nous ont été favorables. Ils nous ont occupés quelques mois. A l’hiver, chacun s’est replié chez soit. Nous avions pris soin d’organiser l’occupation et la surveillance des gués et des quelques collines que nous avions gagnés. Les négociations sont allées bon trains. Chaque camp cherchaient des alliances, chez les autres Galdurs de la plaine, ou les Sinans nos alliés traditionnels. Thargun, notre chef, avait passé un accord avec les clans nains des proches montagnes. Nous avons reçus de bonnes armes naines et de l’acier de qualité. En face, les rumeurs couraient. On parlait de machines de guerre jamais vues, capables de soulever le terrain sous les pieds des ennemis et des les engloutir sous terre, de projectiles empoisonnés, et d’autres choses encore… On disait aussi que des magiciens et des sorciers avaient parcouru la plaine cet hiver là. Une première de mémoire de Galdur. D’habitude on se protège du vent et des loups, on évite de baguenauder…

Au printemps, les combats ont repris. Des escarmouches là encore. Mais à notre désavantage cette fois. Les guerriers qui revenaient des combats parlaient de choses étranges. Des orages qui arrivaient brusquement alors que le ciel était bleu et qui aveuglaient nos troupes, des animaux sauvages en nombre inhabituel et qui attaquaient et désorganisaient nos combattants… Et puis, je l’ai vu moi aussi.

La principale bataille de cette courte guerre. Et la dernière. Au gué de Sharn. Nous le contrôlions encore, mais c’était le point de passage principal vers nos terres. Nous savions que la principale attaque aurait lieu ici. Le clan s’est rassemblé. Jusqu’au dernier. Trois à quatre milles combattants. Environ autant en face. Beaucoup de cavaliers, des archers dispersés sur les flancs. Sauf… le nuage noir en face… derrière les troupes… La nuée qui enfle. Noircit… Et quand les premières victimes tombent, les corps qui se relèvent, les morts qui nous assaillent, le père contre le fils, le fils contre la mère, frères et sœurs contre sœurs et frères… Le chaos, le peur, le froid, la douleur… Une douleur. Intense… et puis… rien.

Quand, je suis revenu à moi, la lune, bleue, clignait de l’œil. Une odeur douceâtre et âcre en même temps flottait autour. J’entendais fouir autour de moi. Un glapissement de charognard de temps en temps. L’air était doux. Un chuintement m’a mis debout. Je suis parti droit devant moi.

Le soleil me martelait la tête et la main. Ce n’était plus qu’une bouillie sanglante. Un doigt manquait. La douleur montait jusqu’à l’épaule.

La fraîcheur d’une source. Des pierres qui roulent. Des ricanements derrière moi. La lumière du jour derrière un pic. Le terrain qui monte progressivement. Un ravin, une pierre tombe, je tombe avec, le monde tourne, jusqu’au noir.

Au réveil, j’étais dans un lit. La main droite bandée. J’ai grogné. « Eh bien ! On revient de loin ! Amzad a bien cru ne jamais te voir éveillé ! » A côté du lit se tenait une femme. Son visage presque à hauteur du mien. J’ai réalisé que j’avais affaire à une Naine. « Je suis Khadri, apothicaire et apprentie soigneuse. Amzad est notre soigneur. Tu es arrivé, il y a plus de deux semaines de la plaine et tenant ton bras droit en balbutiant des mots sans suites. On a juste compris que tu parlais de mort et de malédiction. Ne te lève pas tout de suite, tu as été nourri seulement de soupe, ça ne tient pas au corps pour un grand gaillard comme toi, tu es encore faible. »

Des bavardages de Khadri, j’ai déduit que je m’étais enfoncé assez loin dans les montagnes. Les horreurs de la plaine n’étaient pas arrivées jusque là. Mais suffisamment quand même pour que des patrouilles soient organisées aux limites des montagnes. J’ai passé quelques semaines de convalescence chez ces Nains, mineurs, forgerons et commerçants, si simples et accueillants. Après avoir chassé pour eux, pour payer ma dette en quelques sortes, je suis redescendu. Au gué, ne restaient que des ossements éparpillés et quelques armes brisées qui commençaient à rouiller. Au campement de mon clan, rien. Même les arbres avaient été abattus. Plus de traces des tentes ou des cabanes, justes quelques débris informes ici ou là. Le point d’eau était intact. Il y a avait beaucoup de traces de sabots et d’autres que je n’ai pas identifiées. Pas de traces d’animaux sauvages. Juste ces traces et le vent.

Je suis parti.

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