Le coin du paradis

[Bonaparte]

I/ Insupportable

Debout à l’aube , travail dans les mines à la récolte du fer et du charbon toute la journée et n’en voyant jamais guère le bout , retour chez soi très tard dans la soirée , après un court passage à la taverne , et au lit , après avoir feuilleté quelques pages d’illustres bouquins écrits de la main de nos plus grands auteurs Landais …
Et ce , tous les jours , quelle monotonie , quel ennui ! Je ne trouve guère plus aucun plaisir à ma vie sur Séridia.
A force de travailler aussi durement depuis bien des années , j’ai certes amassé un assez gros pactole , mais cela ne forme guère ma joie , et je commence à sentir la morosité m’envahir …
Je n’ai pas le choix malheureusement , une journée sans travailler , et ce sont des centaines de pièces qui partent à la poubelle …
Je devrais prendre une sorte de retraite , avec l’âge , je travaille de moins en moins efficacement , mais pour aller où ? Ce serait toujours la même chose , je serais toujours prisonnier du système économique qui m’oblige à ne jamais m’arrêter …
Qui plus est , la situation dégénère sur Séridia … La plupart de mes amis nains sont partis s’installer sur Irilion , fuyant l’oppression du seigneur , et la peur qu’ une sorte de traité , signé entre elfes noirs et galdurs , pourrait bien menacer la paix ici envahit quelque peu mon esprit …
Je ne sais que faire , je me tue au travail et l’ennui est toujours aussi présent …
Le pire dans tout cela c’est que Napoleon , mon grand ami nain , est lui même parti pour Irilion , et en même temps , comme je l’expliquais plutôt je ne peux m’en aller d’ici du moins pour le moment , quel déchirement …

[Bonaparte]

II/ Le tuyau

Après une journée passée dans la mine , je faisais route comme à mon habitude vers la taverne du nain joyeux , la plus célèbre de toutes les Landes , et avec la ravissante serveuse connue de tous , Reca …
Je rentrai donc dans la taverne , quand à la grande impression , je vis un groupement de personnes debout face au mur , regardant d’un air béat une affichette au milieu de dizaines d’autres.
J’essayai donc moi-même de me faire une place pour contempler le spectacle.
Et ce que je découvris là , ne me parut point exceptionnel : « traité entre Galdurs et Elfes noirs … »
Ceci n’était à mes yeux que l’officialisation d’une rumeur , mais apparemment les gens autour de moi paraissaient plus surpris.
Un d’eux s’assis à ma table …
« Comment faites-vous pour rester aussi impassible à la nouvelle ? Ici nous sommes tous apeurés , dit-il
- Tout simplement , je n’y prête guère attention , et je pense que vous feriez bien de m’imiter monsieur …
- L’idée d’une guerre ne vous faits donc pas peur ?
- Peur ? Guerre ? Mais où voyez donc vous ça ? Je ne lis que le début d’une alliance qui à mon avis ne durera pas longtemps … rétorquai-je
- Hum , je veux mettre ma famille à l’abris , ici tout va de plus en plus en mal , la seule solution serait …
- Irilion ? Le coupai-je , soit partez alors , puisque vous avez tant peur
- Je ne suis pas seul moi , j’ai des enfants , une femme … »

Je me ressuyais la longue barbe blanche , finissant mon repas …

« L’idée de m’exiler en Irilion m’a souvent parcouru l’esprit , mais il m’en est impossible que de l’exécuter …
- Pourquoi pas ? Là bas nous serions libres , il n’ay aura pas de seigneur pour nous enlever nos droits , pas de guerre …
- Oui , certes mais …
- Faites moi confiance , je m’occupe de tout , vous n’aurez qu’à me payer et alors , nous partirons tous ensemble vers Irilion , par la navette … »

Et c’est ainsi que je remis mon destin entre les mains d’un inconnu qui voulait tout simplement quitter le pays …
Je lui remis 500 pièces d’or qu’il enfouit dans une bourse épaisse …

« Essaye de m’arnaquer et je te couperais la main , je brûlerais ton village entier , et je ferais de ta femme une esclave à ma merci … compris ? Lui dis-je …
- Pas de problèmes , je suis honnête , répondit-il
- Bien , dans ce cas , je vous laisse
- Rendez vous demain soir sur le quai , balbutia t’il , de peur qu’on ne l’entende …

[Bonaparte]

III/ Départ

La nuit était froide , le vent glacial , l’on semblait qu’il voulait me dire : « attends , reste , tu fais une bêtise »
Mon imagination …
Toujours est il que j’avais décidé de quitter ce lieu de souffrance pour rejoindre mon ami de toujours.
Je revis l’homme à qui j’avais confié 500 pièces et il me fit signe que tout allait bien.
On embarquait , seulement quelques passagers , le flux migratoire s’étant surtout effectué la semaine d’avant avec le départ des nains …
La navette avançait lentement sur les vagues , tous les passagers étaient sur le pont …
Au bout de deux heures , nous arrivâmes en Irilion , je n’entendis plus jamais parler de l’homme de la taverne , il avait du trouver refuge quelque part avec sa famille , c’était tout le bonheur que je lui souhaitais …
Un homme avec un grande hotte lourdement remplie s’approcha de moi …
« Vous être Bonaparte ?
- Affirmatif , pourquoi ? Interrogeais je
- Moi avoir lettre pour vous , on a dit à moi que vous être en Irilion maintenant …

Il me tendit la lettre , et surpris je l’ouvris , je vis de suite que c’est Napoleon qui me l’avait adressé

A Mon Ami , Bonaparte , Pierre-Blanche , Séridia

Cher Bonaparte ,

Voilà maintenant une semaine que je suis parti avec mes frères de race. Ici tout va bien , la rythme est bien plus reposant que sur Séridia , et je m’habitue aux longues siestes tranquilles !
Séridia ne me manquerait en rien si tu étais à mes côtés …
Ici , je vis chaque jour comme un paradis , une tranquillité …
J’habite une petite maison dans un hameau non loin d'un miniscule village , proche de là , un bras de mer et à quelques kilomètres , une mine riche en minerais et en monstres , un vrai bonheur …
Je viens encore d’en tuer par dizaines
Je sais que pour toi ce ne sera pas facile , mais essaye de me rejoindre au plus vite , tu ne regretteras tes vieux cailloux ferreux ,

Cordialement , Napoleon

Cette lettre me fit un bien fou et je recherchai activement une taverne où passer la nuit , avant de retrouver le lendemain mon ami

[Bonaparte]

IV/ Le campement

Toutes les auberges visitées étant pleines à craquer , je décidai de passer la nuit dehors , à la belle étoile , tel le nomade que je fus dans ma jeunesse.
Je marchai longtemps , la nuit tombait , le froid se fit intense.
Quand , à mon grand plus bonheur , je vis non loin de là , un groupement de tentes en cercle autour d’un feu de camp …
Quand ils me virent , fatigué comme je l’étais , ils daignèrent m’accorder hospitalité …
L’un d’eux me tendit un gros morceau de volaille cuite que j’avala d’un seul coup j’avais faim !
Puis , un autre pris son banjo et joua quelques notes … Les autres suivirent.
Ha ! Je me rappellerai toujours de cette magnifique ambiance qui régnait en cette soirée d’automne …
Ils racontaient des blagues , des histoires , chantaient leurs aventures , leurs misères …
Enfin , nous allâmes nous coucher , il était très tard …

Dès l’aube , le coq venait à peine de hurler , l’homme fort du campement vint me réveiller
« Vous avoir passé bonne nuit ? »
- « Excellente monsieur , dîtes moi , ce n’est point que votre compagnie m’importune loin de là , mais connaîtriez-vous le lieu de cette demeure ?

Je lui tendis une image , celle de la maison de Napoleon qu’il m’avait envoyé dans sa lettre …
« Moi jamais avoir vu cette maison , mais ce type de habitat être dans Nargraw sud , vous chercher , vous trouver … » Me dit-il
« Bien merci , et quelle route dois-je emprunter pour y accéder ? »
« Vous marcher vers l’est , prendre deux trois bateaux et vous y arriver … »

Je le remerciai et m’en alla vers Nargraw Sud , j’espérai y trouver là bas Napoleon

[Bonaparte]

V/ Inscription

La marche était longue , épuisante , le soleil luisait dans le ciel en traversant nombres déserts , semblant vous narguer de sa puissance … J’en tombais à genoux , la force me quittait , quand enfin j’arrivais dans une petite ville …
Là c’était l’effervescence , la foule criait , chantait , courait sur les places … C’était jour de marché !
Je vis une inscription sur un mûr : « avis à tous les guerriers , les 5 prochains jours , nous organisons des duels de guerriers , où seul vaincra qui tura ! L’inscription est de 55 po et l’entrée spectateur est de 12 po … »
Je m’adressais au bureau d’inscription :
« Tenez voici 55 po , donnez moi les pires adversaires que je m’amuse … »
« Hum , me répondit-on , n’êtes-vous pas un peu vieillot pour ce genre de duel ? »
« Mon bon monsieur , si dans votre jeunesse , vous aviez tué autant que je ne l’ai fait , si votre épée avait autant servi que la mienne , alors peut être pourriez vous me juger … Mais je pense que vous êtes loin d’arriver à ma cheville gauche … »
« Bien les duels commencent demain très tôt dans l’arène du village , on prévoit plus de 8 000 spectateurs , que Fingel vous protège ! »
« Dîtes , vous êtes irrilonais , mais utilisez l’accent Séridien , comment cela se fait-il ? »
« Chacun son histoire , permettez de garder la mienne secrète … »

Intrigué , mais encore tout heureux de l’inscription , je m’en allai louer une chambre pour les 5 nuitées dans une taverne non loin , demain serait une dure journée !

[Bonaparte]

VI / Le tableau

Ma chambre réservée , j’errais dans les rues de la ville , attendant que tombe la nuit …
J’en profitais pour aller consulter le tableau des combattants …
Là je vis , sans trop de surprises , une majorité de galdurs et de nains , aux noms typiquement barbares …
J’étais tout simplement passionné par ce grand tournoi , si je le gagnais , c’était un bon moyen pour me faire connaître en ces nouvelles terres …
Mais ma joie fut interrompu lorsque je vis en bas du tableau : « Napoleon , nain … »
Ma gorge se serra , le nain qui m’avait tout appris , mon meilleur ami !
Je savais qu’il irait loin dans ce tournoi et que j’allais devoir l’affronter à un moment ou à un autre.
C’est lui qui m’avait enseigné toutes les techniques de combats , sur les bêtes et sur les monstres , que d’heures passées à m’entraîner à ses côtés , nous acharnant sur des ennemis bestiaires …
Parfois même l’un contre l’autre , mais chaque fois , il me ridiculisait de par sa technique foudroyante.
La nuit tombait enfin , et je rentrais à la taverne , sans manger , je montais directement dans ma chambre …
Là , j’aiguisé ma meilleure épée pour le lendemain , pensant à Napoleon et à comment je pourras le battre.
Toute la nuit , j’essayais de me remettre à l’esprit ses techniques de combats , visant à me rappeler de ses faiblesses possibles …
Mais je ne trouvais rien , et épuisé par ma longue marche m’endormais rapidement

[Bonaparte]

VII / Premier duel

Le coq chanta à peine l’aube arrivée …
D’un pas sûr , j’enfilai ma meilleure armure , avant de rejoindre l’arène où se déroulerait la première journée de combat.
Là , l’effervescence fut telle que je me crus un instant sur un marché.
La foule s’était amassée en nombre afin de suivre les hostilités.
Jamais je ne vis autant de monde se marcher sur les pieds pour voire la mort ….
J’entrais dans l’arène en même temps que mon adversaire : un Galdur colossal de deux mètres , l’air sûr de lui , le menton carré , le regard droit , le sourire en coin , il me lança : « tu vas souffrir Papi … »
Je ne répondis rien , je le fixais droit dans les yeux essayant d’oublier ses affreuses cicatrices recouvrant sa longue face pâle.
Ses armures étaient modestes mais la lame de son épée tranchante.
Un homme tout en haut annonça : « premier duel d’une longue série : Bonaparte , eldorian exilé face à Rebourdet , Galdur combattant … »
Une seconde plus tard , le Galdur s’élança sur moi sabre à la main …
Il se manqua de peu que sa lame ne se plante entre mes yeux , un réflexe , une seconde.
Profitant de ce fait , je lui attrapai le bras et le recourbai le long de son dos …
Il était coincé et essayait de se dégager. Il y arriva en utilisant toute sa force , si bien qu’il poussa un cris de titan que je n’oublierais jamais. Epuisé , il prit son bouclier et tenta de m’assommer avec …
Il me toucha , mais pas assez fort pour me faire tomber.
Jetant ma lance vers le ciel , pour la récupérer de la main gauche et profitant de l’effet de surprise , je la lui planta en plein ventre . Elle transporta son corps de part en part , ce qui fit crier de joie le public.
Le colosse tomba sur le sol , ce qui causa un léger tremblement de terre.
Une fois m’être assuré qu’il était vraiment mort , en lui fendant le crâne , je remis mon heaume , et saluait la foule.
Enfin , je sortais de l’arène , la foule scandant mon nom avec un accent bizarre

[Bonaparte]

VIII / Soirée à la taverne

Deux heures plus tard, je retrouvais ma chambre exigu aux mûrs sombres et abîmés.
Ereinté par le combat du jour , je demandai à la serveuse à ce qu’elle monte mon repas directement , moyennant bien sûr , un petit pourboire …
Après l’avoir savoureusement dégusté , j’allumai la bougie au dessus de mon bureau et écrivait quelques mots.
L’inspiration ne me venait pas , et je fus surpris lorsque j’entendis frapper à ma porte.
« Qui est là ? » demandai-je
C’est ton ami , Napoleon , me répondit-on … »
Je laissais entrer le nain , que je n’avais maintenant vu depuis quelques semaines …
Les jours l’avaient pourtant figé physiquement , comme si même la taille de sa barbe n’avait diminué ou augmenté d’un millimètre …
« Je t’emmène à la taverne , dit-il
- Avec joie , je meurs d’ennui seul dans ce taudis …
Nous partions ainsi vers la taverne du passage de Fénégor.
Après une courte marche , nous arrivâmes au lieu dit.
En entrant , nous pûmes constater combien l’ambiance était chaleureuse.
On aurait dit , comme une gigantesque cérémonie où tout le monde se connaissait !
Les nains , surtout , remplissaient cette taverne , au moins huit personnes sur dix appartenait à cette race.
J’essayais de cacher ma taille pour que l’on ne me prête trop attention.
Napoleon et moi nous assîmes à une table où déjà plusieurs personnes festoyaient.
Il ne fallait pas avoir l’intelligence d’un chambellan pour deviner qu’ils étaient ivres , tant ils avaient du mal à rester en place et à modérer leurs propos ...
Les minutes passant , je me sentais de plus en plus à mon aise , et je parlais même avec les nains avec qui je n’avais l’habitude d’entretenir des discussions « intelligentes ».
Mais l’ambiance était telle que nous nous fondions en masse dans la taverne , oubliant nos problèmes et nos origines.
« Dis moi Napo , j’ai vu que tu t’étais inscrit au grand combat dans l’arène …
- Oui , répondit-il , j’ai toujours eu une certaine passion pour les baffes »
Il adressa un large sourire , comme si je devais me méfier de lui , comme si il serait le vainqueur de ce tournoi.
« Tu sais , je me suis moi même inscrit , et ait commencé fort en envoyant un colossal galdur au tapis en moins de quatre minutes … répondis-je
-Oui , j’étais dans les gradins et j’ai pu apprécier le combat. Mais dès demain , ce sera différent , tu affronteras Max Einl , un terrible elfe noire , reconnu dans tout Irilion pour sa force et sa violence au combat. On raconte qu’il est capable d’assommer un Cyclope avec une seule main.
Ce que me racontait Napoleon , ne me fit pas peur , et au contraire , j’éprouvais une certaine joie à l’écouter parler , exagérer …
La soirée se continuait ainsi , nous parlions tantôt de guerre , tantôt de politique ( les nains avaient d’ailleurs à ce sujet , quelques avis explosifs , l’alcool ne le aidant pas à se modérer … ) jusqu’à ce que tombe la nuit.
Je rentrais à l’auberge , le plus vite possible , tant rentrer dans mon lit m’impatientait …

[Bonaparte]

IX / Intrusion

Le coq du village chantait à s’en rompre les cordes vocal ce qui eut pour conséquence de me réveiller …
A moitié endormi , j’ouvrai les volets puis les rideaux de ma fenêtre pour être ébloui par le soleil.
L’aube déjà , et le combat qui s’annonçait ! Un brin de toilette , un frugal repas et je me mis en route vers l’arène où peut être j’y laisserais la vie …
L’elfe noir était déjà là …. Il portait des armures très lourdes sur toutes les parties de son corps , ce qui semblait le gêner dans ses déplacements. De taille imposante , deux têtes de plus que la moyenne elfique , il me fit signe d’avancer vers lui.
C’est alors que je sortis mon sabre du fourreau , le combat s’annonçait violent.
Il leva sa grande hache haut vers le ciel et frappa en ma direction.
Réflexe , je l’esquivai de justesse et m’apprêtait à lui rendre le coup , mais il porta plus proche encore le bouclier à son visage … Mon épée se fracassa sur son bouclier et la titane et la puissance du coup eut pour effet de briser ce sabre en deux.
J’étais fichu , car déjà , je vis dans les yeux de l’elfe un sourire de satisfaction , quel effroi !
C’est alors qu’un homme dans les gradins en costume d’officier porta un amplificateur de son à sa bouche et ordonna : « Des invasions de créatures en tout genre ont eu lieue dans nos villes telles Idaloran ou Irinveron … , le combat est remis à plus tard , c’est la guerre , allez tous défendre la population ! Des Séridiens sont déjà en route pour combattre à nos côtés … »
Surprise , cris de peurs chez les spectateurs , et joie chez moi ! J’étais sauvé , enfin momentanément , car déjà il me fallait partir pour Idaloran … Que nous attendrait il là bas ? L’horreur , la souffrance , ou simplement une fausse alerte ? Je n’allais le découvrir que le lendemain …