Chapitre cinq: Dans le sac
Félindra lovée contre lui, la tête contre une sorte de coussin, Avachi savourait la douce fourrure d'ours polaire avec laquelle il s'était recouvert, lui et la panthère. Il ne pouvait pas s'empêcher de parler tout haut. "
Quelle ingratitude !" Son père, malgré ce qu'il avait pu écrire dans son message, n'avait pas changé. Avachi était énervé, mais la parfum de la fourrure le calma petit à petit, et, c'est épuisé qu'Avachi s'endormit.
C'est en sursaut qu'il se réveilla. Il cru avoir rêvé... mais... non. Un mouvement de la panthère se dit-il. Mais celle-ci ronronnait doucement contre lui.
Se disant qu'il lui faudrait un peu mieux se préparer à ce qui l'attend, Avachi sorti sa lame D'jhi pour l'aiguiser. En fouillant son sac il tomba alors sur ce petit coffret qu'il avait oublié, avec toutes ces aventures. Il s'agissait tout simplement d'une collection de potions, de tout ce que son maître Kargorm avait pu découvrir comme potions fantastiques, rassemblées ensemble, avec notice explicative. Il se mit donc à étudier machinalement le contenu, et en retint celles qui lui paraissaient les plus intéressantes, outre la potion trois pas bien sûr.
Bouclier de feu suprême
Vous serez temporairement insensibles à la chaleur.
Potion de nain
Vous deviendrez dix fois plus petit, sans limite de temps. Attention: si vous buvez sous l'effet de la potion, ses effets seront atténués. Pour arrêter ses effets prendre l'antidote correspondant.
Souriant en lisant la dernière notice, Avachi rangea les fioles. En refermant son sac, il tomba sur une petite fiole que l'elfette lui avait donné. La notice disait "Potion de concentration", une potion aux effets étranges. Elle serait sûrement utile le moment venu.
C'est alors qu'une surprise de taille attendait Avachi: une voix bien connue le salua:
-
Ch'waaark cousin!
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Pyrrro mon cousin ! Que fais-tu ici? Comment es-tu venu?
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Mais... j'ai tout simplement vu le message que tu avais laissé chez Reca, et j'ai suivit tes traces. Dis donc ils sont coriaces, ces démons!
-
Pyrrro! Tu ne peux pas savoir comme tu tombes à pic.
Avachi s'empressa de raconter les événements passés, puis de fourrer toutes ses affaires dans son sac. C'est donc en compagnie de son cousin qu'Avachi prit la route, et non de son frère, ce dernier étant somme toute bien moins volontaire, lui. La panthère se réveilla puis s'étira, les pattes en avant, puis fit le gros dos, avant de se sentir assez dérouillée que pour démarrer la journée.
Chapitre six: Au cœur de la terre
Quelques heures plus tard, Avachi et Pyroxène marchaient côte à côte en compagnie de Félindra. Curieusement, les démons de feu les laissaient tranquille. Ils fourmillaient à gauche et à droite, mais ne semblaient oser attaquer. Peut-être n'avaient-ils jamais vu de panthère noire? Ou la vénéraient comme un dieu? Ou, plus simplement, ils attendaient un endroit propice pour attaquer? Ces questions sans réponses trottaient dans la tête du galdur, il ne se souvenait de rien de ce genre dans ses lectures.
Si ce n'est... Mais oui! Ça lui revenait à présent: il y avait, dans une des histoires qu'il avait lu, la mention d'un animal noir, souple et agile, qui courrait plus vite que son ombre et grimpait aux arbres. Un animal si beau, qu'il était vénéré par les démons de feu, et surtout craint, car doté de longs crocs pointus et de griffes crochues. Avachi n'en revenait pas: c'est bien la peur qui les protégeaient lui et le fauve! Pourtant une panthère est bien moins coriace que ces monstres, à entendre les échos qu'il a eu à la caverne... Les démons auraient mis en difficulté et même tué plus d'un des meilleurs combattants. Et puis... il y avait une chose... Avachi ne se souvenait plus très bien... une chose qui faisait perdre toute peur ou toute raison aux démons. Une chose qui faisait qu'ils fonçaient vers leur ennemi, tête baissée, quoi qu'il advienne. Il ne faudrait pas déclencher une chose pareille, ce serait la catastrophe!
Le ciel prenait petit à petit une couleur étrange. D'un côté il virait au noir d'encre et de l'autre, il commençait à rougeoyer. Pour finir, les trois compagnons se retrouvèrent en face d'une immense montagne, dont la lumière jaillissait de son sommet. Il s'agissait d'un volcan! Beaucoup de choses s'expliquaient maintenant. Ils atteignaient leur but: ce volcan était le point de repli des démons, leur source d'énergie et la clef de toute la menace. Mais par où fallait-il aller?
Avachi pensa tout d'abord au centre du cratère, par analogie avec celui d'Irilion. Mais en approchant un peu plus ils se rendit compte que le volcan fourmillait de démons, il serait impossible de monter sur son sommet en un morceau. Il fallait trouver un autre passage. En approchant du volcan, Avachi sentait doucement comme une chaleur sur sa poitrine. Étonné, il y porta la main, pour trouver un petit sac de cuir. Avant son départ, Kerbéros lui avait donné une pierre d'un rouge intense. Une pierre, disait-elle, qu'elle aurait enchantée de toute sa puissance de mage avant de quitter son village natal. "
Cette pierre réagit au feu", avait-elle dit. "
C'est une pierre de feu, elle libérera sa puissance dans celui-ci". Avachi la portait précieusement au cou, dans un petit sac de cuir, pour ne pas la perdre.
A présent, les démons étaient si nombreux qu'ils barraient la route. Il allait falloir combattre! Résolut, Pyroxène ouvrait la marche, Félindra la fermant. Ils commencèrent à faire le tour de la montagne, à la recherche d'une entrée, taillant par-ci, entaillant de là, mordant et griffant les derniers. Avachi avait sorti toute une panoplie de potions aidant au combat, et Pyroxène reconnu la qualité de fabrication des aventuriers de Séridia. Les démons s'écartaient presque, et il suffisait de les tenir à distance pour passer. La pierre enchantée chauffait de plus en plus, et doucement cela devenait insupportable, mais Avachi ne pouvait se résoudre à la porter autrement, cette pierre lui étant trop chère.
Enfin, les deux galdurs tombèrent sur une faille dans le flanc de la montagne. Large de quelques pouces, de la lumière en sortait de manière diffuse. Cela faisait un moment qu'ils tournaient en rond à la recherche d'une entrée, et il semblait qu'il n'y aurait rien de mieux que ce qu'ils venaient de trouver. D'autant plus que des éclats de grognements de démons sortaient de temps à autres des entrailles de la terre. Avachi prit donc la décision de s'y engager: avec les potions de Kargorm cela était possible, mais seul un des deux pourrait y arriver. C'est donc avec regret qu'Avachi se résolut à confier Félindra à son cousin, lui recommandant d'en prendre soin. Mais celle-ci ne l'entendait pas de cette oreille: elle devait veiller sur Avachi, elle le ferait jusqu'au bout. Admirant le courage du félin, Avachi vida son sac de son superflu et, tant bien que mal, mit la panthère dedans. Ainsi, la panthère recevrait les effets de la potion en même temps que lui.
Avahi ouvrit la petite fiole, renifla son odeur, et la but. Aussitôt la potion de nain fit son effet, et il put s'immiscer dans les entrailles du volcan, après avoir prit congé de Pyroxène. A l'intérieur il faisait très chaud. Avachi avançait, et bientôt la faille donnait sur une sorte de couloir. Les démons ne semblaient pas le voir, tant il était minuscule. La chaleur intense était de moins en moins supportable, et sans réfléchir Avachi but à son outre d'eau, et ce n'est qu'une fois désaltéré qu'il remarqua que les effets de la potion avaient disparus. Risquant d'être découvert, maintenant qu'il avait sa taille normale, il s'empressa de faire boire à Félindra, qui gémissait en pendant de la langue, puis prit une potion bouclier de feu suivie d'une d'invisibilité. "
Heureusement," se dit-il, "
que Kargorm a fait ces potions avec soin, autrement ch'warrrk l'indigestion!".
Il fallait agir très vite à présent, vu les effets temporaires de la potion. Avachi se mit donc à courir, bousculant même de temps à autre un démon qui flânait là. Il s'enfonçait de plus en plus profondément sous terre, et peu à peu la galerie qui le conduisait se faisait plus large. Finalement, il accéda à une énorme cavité, remplie d'un lac de lave. Au milieu se trouvait une petite île, avec un autel sur lequel scintillait un objet oblongue. A sa verticale, une colonne de lumière, qui se noircissait au fur et à mesure qu'elle allait vers le haut. Une ouverture dans le plafond faisait place à un flux de particules noires qui disparaissaient dans l'orifice dans un curieux sifflement. Un labyrinthe de ponts reliait l'îlot central au bord de la caverne. Çà et là un couloir partait de la caverne, et un ou deux gardes somnolaient dans la torpeur de cette atmosphère démoniaque. Il était évident que la clef de la menace était cet objet allongé !
Avachi sorti Félindra de son sac, et, tout en caressant Félindra pour la rassurer, prit le temps de trouver le chemin le plus court. Une fois l'enchaînement de ponts encrés dans sa mémoire, il quitta son poste d'observation et se remit à courir, enchaînant les ponts les uns après les autres. Félindra le suivait, agile et souple, mais parfois surprise par les détours que le galdur semblait prendre...
La pierre qui pendait à son cou n'était plus seulement chaude, mais elle commençait à rayonner. Une lumière rouge sombre en sortait, et au fur et à mesure qu'il avançait la lumière était de plus en plus vive. Bientôt il reconnu l'objet central: il s'agissait d'une dague, cette fameuse dague magique! Il fallait donc la détruire, mais comment diable? Ce n'était certainement pas le feu qui pouvait le faire, cette dague
créant le feu! Un plan diabolique germa dans l'esprit du galdur.
Au moment même où Avachi ouvrit son sac pour fouiller dedans, la potion d'invisibilité perdit son effet. Instantanément les gardes remarquèrent sa présence et sonnèrent l'alerte. En un rien de temps une multitude de démons arrivèrent aux abords de la caverne, de l'autre côté du lac de lave. Les premiers démons se mirent à courir dans tous les sens, cherchant à atteindre l'îlot central. D'autres se mirent à nager dans la lave, et cette situation lui rappela de manière fort désagréable ce qu'il avait lu dans ces ouvrages dans se jeunesse: "une fois le centre atteint, plus rien ne les retients". Un démon, s'il voit la dague centrale menacée, est prêt à tout pour la protéger. Il devenait évident qu'il ne restait plus beaucoup de temps à Avachi, et que Félindra ne serait pas d'une grande protection cette fois-ci.
Rapidement, Avachi sorti la pierre de feu de son petit sac de cuir. Il prit ses outils d'artisan, et entreprit de détacher la dague. Ensuite, travaillant avec précision, il enchâssa la pierre dans le manche de la dague, là où apparemment une pierre précieuse la décorait jadis. Versant la potion de concentration, les effets de la pierre furent démultipliés. La lumière qui en sortait était devenue aveuglante, et il sembla à Avachi que la lave au bord de l'îlot central reculait légèrement. Il avait vu juste! La pierre allait réagir, ça oui! Il prit Félindra dans ses bras et alors que les premiers démons aient fini leur traversée, il jeta la dague dans la lave et s'encouru par le premier pont.
Instantanément ce fut le chaos. Un bruit assourdissant retenti et Avachi se senti bousculé, soufflé, englouti par la lave, et finalement, dans une énorme explosion, projeté dans les airs. La pierre, enchantée et aux effets concentrés, faisait littéralement fait exploser le volcan. Il ne restait plus de temps à perdre. Emmené par la lave, Avachi rejoint rapidement une des couloirs de sortie, et il bénit la potion de bouclier de feu qui agissait toujours. Il prit pied et se rua en avant, ne sachant pas trop par où aller. Les démons de feu, quant à eux, semblaient perdus, se lamentaient et titubaient à gauche où à droite, harassés, et ne voyaient même pas le galdur et la panthère passer à côté d'eux. Derrière, la lave montait et engloutissait peu à peu ceux qui restaient la. Un grondement sourd se faisait entendre, et au fur et à mesure qu'il amplifiait le sol commençait à trembler. Et pour ne rien arranger la potion bouclier de feu commençait à perdre ses effets... Encore une fois c'est l'instinct de Félindra qui sauva la vie au galdur. Alors qu'il se croyait perdu, la panthère prit les devants et s'engouffra dans une faille. Avachi la suivit, et bien vite la lueur du jour naissant jaillissait au loin. Tous deux sortirent du flanc du volcan et continuèrent leur fuite, le grondement jaillissant toujours de ses entrailles...
Chapitre sept: Frustration
Ils durent encore courir longtemps avant de se sentir enfin à l'abri. Au bout de longues heures, ils trouvèrent un abri dans une sorte de caverne. A ce moment, un énorme bruit d'explosion se fit entendre, et un vent formidable se leva, soufflant la cendre de tous se recoins, découvrant une terre nue, noircie mais balayée. Çà et là des pierres de lave refroidies retombaient, et le galdur serra Félindra qui tremblait de tout son corps, ne comprenant pas ce qui se passait. Avachi, lui, se sentait en sécurité et regardait le spectacle depuis l'entrée de son abri. C'est alors qu'une scorie de plus traversa le ciel, et, à l'inverse des précédantes, elle étincelait étrangement d'un rouge sombre. Avachi la suivit des yeux, intrigué, et Félindra fit de même. Elle disparut derrière les collines, puis une gerbe de feu s'éleva au ciel. Avachi décida de prendre le risque de sortir et de tenter de retrouver l'endroit d'impact avant que le jour ne tombe.
C'est grâce au flair de la panthère que l'endroit fut rapidement trouvé. Mais au centre Avachi ne trouva rien. Il allait repartir, quand Félindra gratta le sol à en endroit et se mit à grogner. Le galdur s'approcha et ne vit qu'un morceau de charbon. Mais un détail l'intrigua: ce morceau avait la forme d'une pierre taillée... exactement la même forme que la pierre de feu qu'il avait enchassé quelques heures auparavant! Il prit le charbon dans sa main et le frotta contre son pantalon. Rapidement il recconu la pierre qu'il avait eu en main, mais elle dégageait une aura différente. Se serait-elle transformée dans le volcan, alors que toute cette énergie avait été dégagée? Avachi mit la pierre dans une bourse de cuir, et la pluie de scories avait cessé, il se mit en route en direction des siens.
Bien vite le galdur reconnut l'emplacement de la caverne de fortune. Les galdurs étaient sortis, et, heureux, Avachi se rendit à leur rencontre, espérant aussi y retrouver son cousin. Il tomba rapidement sur son père, qui le regarda d'un oeil noir.
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Comment, te voilà, toi, enfin! Fénéant! Vois comme ton cousin a combattu et surmonté la menace, au lieu de traîner je ne sais où! Tu fais honte à la famille! Je doutais de ton entreprise sans vouloir te le dire, mais maintenant je sais que j'avais raison!
Avachi, peu surprit par cet ultime dénigrement de la part de son père, regardait Pyroxène qui, non loin de là, haussait les épaules, les bras en l'air, semblant signifier qu'Enakb n'avait même pas voulu entendre ses explications. Il avait vu arriver Pyroxène en premier, et en avait tiré ses conclusions. C'est donc la rage au coeur, la tristesse de ne jamais pouvoir se réconcilier un jour avec son père, qu'Avachi lui tourna le dos, et s'en alla avec Félindra à ses côtés.
Machinalement, il jeta un oeil dans la bourse de cuir pour regarder l'étrange pierre qu'il avait trouvé. Elle avait repris son aspect charbon...